Annoncé fin juin comme le plus gros accord commercial jamais négocié, le Mercosur a soulevé un tollé général en France et dans la majorité des pays européens. Historique parce qu’il allait engager les 4 pays d’Amérique du sud à respecter l’accord sur le climat et nos normes sanitaires européennes.
En plein débat sur la ratification du CETA en France, il a fait l’unanimité contre lui et a contribué à des positions communes – et ce n’est pas fréquent – entre agriculteurs, écologistes, consommateurs.
Tout d’un coup, l’agriculture française était gratifiée de toutes les vertus face à l’épouvantail sud-américain : feedlots, déforestation, hormones, scandales sanitaires… « N’importons pas l’alimentation que nous ne voulons pas » est notre cri de ralliement, l’appel au sursaut français pour éviter une tromperie des consommateurs et des distorsions insupportables pour les agriculteurs. Nous avons dénoncé l’absence de garanties sérieuses sur les engagements des dirigeants du Mercosur, notamment du Brésil, quitte à nous faire traiter de « néo protectionnistes » !
La suite est un scénario incroyable : en juillet M. Bolsonaro a humilié le Ministre des Affaires étrangères français en annulant leur rendez-vous pour se rendre… chez son coiffeur (tweet à l’appui). Puis le 2 août, il limoge le directeur de l’institut chargé de surveiller la déforestation, car les chiffres sont catastrophiques ! Résultat : une explosion des incendies. C’est la confirmation parfaite des intentions réelles au Brésil : déforester plus, pour produire plus, pour exporter plus !
Tout l’été, la FNSEA n’a cessé de dénoncer cet effondrement assuré pour nos secteurs bovins, volailles, éthanol, sucre, mais aussi fruits, miel…
La joute verbale entre Messieurs Bolsonaro et Macron fut d’une rare violence. Nul ne saura si les arguments écologiques ont pesé plus que les arguments économiques, mais dans un sursaut salutaire, le Président français a annoncé le 23 août « qu’il ne signerait pas le Mercosur en l’état ».
C’est une décision de sagesse que nous saluons, mais nous restons très vigilants. A nous de rappeler aux décideurs politiques la double nécessité de cohérence de leurs décisions et de respect des efforts constants des agriculteurs et acteurs de filières français pour des produits de qualité. A nous d’exiger la transparence parfaite sur l’origine des produits pour des clients de plus en plus attachés aux achats responsables.
C’est le meilleur gage de sauvegarde de notre agriculture.
Tribune de Christiane Lambert